guide pratique SBTi

Réduire ses émissions avec la SBTi : guide pratique pour les entreprises

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Introduction : Pourquoi les entreprises adoptent la SBTi

La stratégie climat des entreprises est devenue un enjeu stratégique majeur. Entre réglementations environnementales renforcées (CSRD, BEGES), attentes des investisseurs en matière ESG et pression des clients pour plus de transparence, les organisations doivent structurer leur trajectoire de décarbonation. Dans ce contexte, la Science Based Targets initiative (SBTi) s’impose comme le cadre de référence international pour définir des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) basés sur la science climatique.

En mars 2024, près de 8 000 entreprises participaient à l’initiative, dont 358 entreprises françaises (214 avec des cibles validées). La SBTi permet d’assurer que les objectifs climatiques sont alignés sur les recommandations du GIEC et les objectifs de l’Accord de Paris, pour limiter le réchauffement global à 1,5 °C.

Qu’est-ce que la SBTi et comment fonctionne-t-elle ?

Une initiative internationale de référence

La Science Based Targets initiative (SBTi) est aujourd’hui un pilier incontournable pour toute entreprise souhaitant construire une stratégie climat crédible et ambitieuse. Lancée en 2015 par le CDP, le Pacte mondial des Nations unies, le World Resources Institute (WRI) et le WWF, cette initiative offre un cadre scientifique rigoureux pour transformer les ambitions en actions mesurables.

En tant que cabinet de conseil spécialisé en RSE et stratégie climat, nous accompagnons nos clients dans l’intégration de cette méthodologie reconnue : la SBTi permet d’aligner les réductions d’émissions sur des trajectoires compatibles avec les objectifs de l’Accord de Paris (1,5 °C ou 2 °C selon les périmètres), ce qui renforce la crédibilité des engagements climatiques.

La force de la SBTi réside aussi dans son processus de validation : chaque objectif soumis est examiné par un comité indépendant d’experts scientifiques et RSE, garantissant que les ambitions ne restent pas théoriques, mais donnent lieu à des cibles robustes, mesurables et alignées sur les standards internationaux.

Les trois piliers de la méthodologie SBTi

Le processus repose sur une approche structurée en trois volets :

Des lignes directrices fondées sur les sciences du climat : les objectifs doivent être alignés sur les trajectoires de réduction nécessaires pour limiter le réchauffement à 1,5 °C sur les émissions directes ou indirectes liées à l’énergie (scopes 1 et 2) ou bien en dessous de 2 °C pour les émissions indirectes liées à l’ensemble de la chaîne de valeur (scope 3).

Un Technical Advisory Group d’experts : composé de scientifiques et de spécialistes RSE, ce groupe examine et valide chaque soumission selon des critères précis et transparents, garantissant la cohérence avec les trajectoires climatiques.

Une validation rigoureuse et indépendante : les entreprises doivent démontrer que leurs objectifs sont suffisamment ambitieux, mesurables dans le temps, et cohérents avec les accords climatiques internationaux. Les objectifs doivent respecter un certain nombre de critères techniques pour être validés.

Les types d’objectifs validés par la SBTi et les critères techniques stratégiques

La SBTi ne propose pas une approche unique : elle permet aux entreprises de définir des objectifs variés selon leur maturité et leur stratégie climat. Parmi les possibilités, on trouve des objectifs à court terme, généralement conçus sur une période de 5 à 10 ans, pour structurer des actions rapides et concrètes. Mais l’initiative encourage également des visions à long terme, souvent articulées autour d’un horizon net zéro, pour garantir une trajectoire durable et cohérente.

Les cibles ne se limitent pas aux réductions directes d’émissions : la SBTi permet aussi de formaliser des objectifs sur l’approvisionnement en énergies renouvelables, ou encore des engagements dans la chaîne de valeur (fournisseurs, clients) pour réduire les émissions du scope 3, ou des ambitions liées à l’efficacité énergétique. Ce large éventail offre une flexibilité stratégique aux entreprises, tout en encourageant des actions systématiques et intégrées.

Mais pour que ces objectifs soient validés, la SBTi impose des critères techniques stricts :

  • Concernant la couverture des émissions, les entreprises doivent viser au minimum 95 % des émissions des scopes 1 et 2.
  • Pour le scope 3, si celui-ci représente plus de 40 % du total des émissions (scopes 1 + 2 + 3), l’entreprise doit couvrir au moins 67 % de ces émissions avec des objectifs validés.
  • Il existe des marges d’exclusion : jusqu’à 5 % peuvent être exclus à la fois du périmètre d’inventaire (émissions déclarées) et de l’objectif, tant pour les scopes 1 et 2 que pour le scope 3.
  • Enfin, la méthodologie de calcul utilisée doit être à jour : les cibles doivent être modélisées avec les versions des outils et méthodes validés par la SBTi.

Comment s’engager dans la démarche SBTi ?

Les 4 étapes du processus d’engagement

1. Engagement formel (Commitment) : L’entreprise signe une lettre d’engagement qui la lie publiquement à définir des objectifs scientifiques dans un délai de 24 mois. Cette étape initiale est gratuite et permet de rejoindre la communauté mondiale SBTi.

2. Développement des objectifs (Development) : Sur la base d’un bilan carbone complet (incluant les trois scopes), l’entreprise définit ses objectifs de réduction en utilisant les outils et méthodes fournis par la SBTi.

3. Soumission et validation (Submission & Validation) : Les objectifs sont soumis à une équipe d’experts de la SBTi qui analyse la soumission. Les frais de validation varient selon la taille de l’entreprise, ainsi que selon les volontés de celle-ci à valider des objectifs à court ou long terme.

4. Communication et suivi (Disclosure) : Une fois validés, les objectifs sont publiés sur le site officiel de la SBTi. L’entreprise doit ensuite communiquer annuellement sur ses progrès et peut faire revalider ses objectifs tous les 5 ans pour maintenir leur pertinence scientifique face à l’évolution des connaissances climatiques.

Les prérequis indispensables avant de s’engager

Plusieurs conditions sont nécessaires pour réussir son engagement SBTi : disposer d’un bilan carbone récent et exhaustif (incluant les trois scopes d’émissions), obtenir l’engagement réel de la direction générale sur les enjeux climat, prévoir des ressources humaines et financières dédiées au pilotage, et mettre en place un système de collecte et de suivi des données GES fiable et pérenne.

À quoi sert concrètement la SBTi pour une entreprise ?

Structurer sa stratégie de décarbonation

La SBTi offre un cadre méthodologique structurant pour piloter la transition bas carbone. Elle permet de :

  • Clarifier les objectifs de réduction au-delà du simple diagnostic, en fixant des cibles chiffrées (en % ou en valeur absolue) et datées à court terme (5-10 ans) et long terme (2050) alignées avec les avancées scientifiques du réchauffement climatique. La SBTi permet de construire les bases d’un plan de décarbonation efficace et concret.
  • Renforcer la crédibilité climatique auprès de toutes les parties prenantes : clients qui intègrent les critères carbone dans leurs achats, investisseurs ESG qui évaluent les risques climatiques, collaborateurs sensibles aux engagements vérifiables, et partenaires financiers qui valorisent les démarches scientifiques.

Se différencier face au greenwashing

Dans un contexte où les allégations climatiques sont scrutées avec attention, la validation indépendante par la SBTi apporte une reconnaissance internationale solide. En France, 88 % des entreprises cotées au CAC 40 avaient fixé ou s’étaient engagées à fixer des objectifs SBTi.

SBTi et autres démarches climat : quelle complémentarité ?

Les objectifs validés par la science deviennent de plus en plus exigés dans les plans de transition climat par les différentes parties prenantes ainsi que dans les référentiels de reporting auxquels sont soumises les entreprises.

Les limites et idées reçues sur la SBTi

Une vision réaliste des contraintes

La SBTi se concentre exclusivement sur les émissions de gaz à effet de serre et ne couvre pas les autres aspects environnementaux (biodiversité, ressources en eau, économie circulaire, déchets) ni les dimensions sociales de la RSE. C’est un choix méthodologique qui garantit la rigueur mais nécessite d’être complété par d’autres démarches pour une stratégie RSE complète. Afin de traiter d’autres enjeux environnementaux, les créateurs de la SBTi ont également créé ce qu’on appelle la SBTN (Science Based Targets Network). Cette initiative vise à élaborer des cibles scientifiques pour la nature à l’intention des entreprises et des villes, afin qu’elles puissent prendre en compte de manière globale leurs impacts environnementaux sur la biodiversité, les terres, l’eau douce et les océans.

Les défis opérationnels à anticiper

La définition et la validation des objectifs nécessitent un processus technique rigoureux, impliquant des compétences en comptabilité carbone et en modélisation climatique. Les efforts pour atteindre les objectifs peuvent être conséquents, surtout pour les entreprises ayant une forte empreinte carbone, des processus industriels complexes ou une dépendance marquée aux énergies fossiles. Le coût et la complexité varient significativement selon la taille et le secteur d’activité : une PME aura besoin de ressources proportionnellement plus importantes qu’un grand groupe déjà structuré.

Trois idées reçues à dissiper

« La SBTi est réservée aux grandes entreprises » : Faux. Les PME peuvent s’engager avec des processus de validation simplifiés et des coûts adaptés selon la taille de l’entreprise.

« Valider des objectifs SBTi équivaut à atteindre la neutralité carbone » : Non. La SBTi définit des trajectoires de réduction ambitieuses, mais ne certifie pas la neutralité carbone qui nécessite des démarches complémentaires et l’atteinte effective des objectifs. Néanmoins, les objectifs long terme net zéro peuvent être validés par la SBTi.

« Les objectifs SBTi sont figés dans le temps » : Faux. Ils peuvent être révisés tous les 5 ans ou en cas de changement significatif dans l’entreprise (fusion, acquisition, changement majeur de périmètre ou de modèle d’affaires).

Ces éléments permettent de replacer la SBTi dans une perspective réaliste et pragmatique, condition essentielle pour un engagement réussi et durable.

SBTi et obligations réglementaires : anticiper la CSRD

Un cadre complémentaire au reporting climat réglementaire

La SBTi constitue un outil structurant pour anticiper les obligations de reporting et de transparence, notamment celles prévues par la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) qui s’applique progressivement aux entreprises européennes depuis 2024.

En alignant les objectifs sur la science climatique, les entreprises disposent d’une base solide pour produire des rapports cohérents. Les méthodologies SBTi sont compatibles avec les standards ESRS (European Sustainability Reporting Standards), particulièrement sur le volet climat (ESRS E1). Les données collectées pour la SBTi alimentent directement les indicateurs requis, notamment sur les plans de transition climat et les trajectoires de décarbonation à court, moyen et long terme.

Un atout pour la taxonomie européenne et la finance durable

Les entreprises engagées dans la SBTi démontrent leur contribution aux objectifs d’atténuation du changement climatique, l’un des six objectifs environnementaux de la taxonomie européenne. Cet alignement facilite l’accès à certains financements verts et renforce la position de l’entreprise dans les dialogues avec les investisseurs ESG et les institutions financières qui intègrent les critères climatiques dans leurs décisions d’allocation de capital.

La combinaison SBTi + CSRD renforce la crédibilité auprès des parties prenantes et facilite la communication sur la stratégie climat, en offrant un cadre cohérent entre ambitions volontaires et obligations réglementaires.

Conclusion : La SBTi comme référentiel de la transition bas carbone

La SBTi constitue aujourd’hui le référentiel scientifique international de référence pour les entreprises souhaitant définir et suivre des objectifs de réduction des émissions cohérents avec les enjeux climatiques globaux. Elle permet de structurer les ambitions climat, de rendre les objectifs mesurables et de suivre les progrès de manière transparente, tout en s’intégrant dans une stratégie RSE plus large.

Au-delà de la simple validation d’objectifs, la SBTi fournit aux décideurs un cadre rigoureux pour piloter leur transformation bas carbone. Elle transforme une intention en engagement vérifiable, un diagnostic en trajectoire scientifique, ce qui va permettre à l’entreprise de transformer une ambition en plan d’action opérationnel. Dans un contexte où la crédibilité des engagements climatiques est scrutée avec attention par l’ensemble des parties prenantes, la SBTi offre un langage commun qui facilite le dialogue et renforce la confiance.

Grâce à son cadre méthodologique éprouvé et sa reconnaissance internationale, la SBTi permet de mieux comprendre les enjeux, d’organiser la stratégie climat de manière structurée et de renforcer la crédibilité des engagements. Pour les entreprises qui cherchent à concilier performance économique et responsabilité climatique, elle représente un outil de pilotage différenciant sur le long terme, aligné sur les meilleures pratiques internationales en matière de décarbonation.

Recommander la SBTi à nos clients, c’est offrir un plan structuré, crédible et stratégiquement solide : cela permet non seulement d’identifier les leviers d’action prioritaires, mais aussi de construire une communication pertinente vis-à-vis des parties prenantes (investisseurs, clients, fournisseurs…), fondée sur des engagements scientifiquement validés.

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